Collection Roger Marx. Tableaux, Pastels, Dessins, Aquarelles, Sculptures

"Commissaires-Priseurs
Me F. Lair-Dubreuil ; 6, Rue Favart
Me. Henri Baudoin

Experts
MM. Durand-Ruel
MM. J. & G. * Bernheim-Jeune"

"exposition particulière" : sat 09/05, 1:30pm - 6pm "exposition publique" : sun 10/05, 1:30pm - 6pm "vente" : mon 11/05, 2 pm, "numéros pairs" ; tue 12/05, "numéros impairs", 2 pm

Nr. of pages: 121 [PDF page number: 221].
Holding Institution: online: archive.org

Alexandre, Arsène: [no title], p. 5-10

"La belle et trop brève carrière de Roger Marx offre dès son début un trait remarquable. Son amour inné et passionné des choses d'art est à même de se signaler tout de suite par le fait et par l'idée, par la plume et par l'action. Le fonctionnaire éminent entre en scène en même temps que l'écrivain doué de raffinement, de jugement et d'ardeur.

Un homme qui avait pris part, et part puissante, aux luttes et aux victoires de l'École de i83o, puis à celles des réalistes groupés autour de Courbet, arrive à ta Direction des Beaux-Arts. Castagnary ne considère pas, parce que ses convictions ont triomphé, que la vie s'arrête et que l'évolution soit finie. Il jette les yeux autour de lui, cherche pour collaborateur un représentant des aspirations nouvelles qui soit, en même temps, informé des acquisitions dont elles sont issues. Cet esprit qui unit le culte des belles œuvres d'hier et la volonté de défendre les belles œuvres de demain, il le trouve chez un jeune homme venu de Nancy et qui fait, en même temps que ses premières armes dans la presse, ses premières preuves d'activité dans l'administration, c'est Roger Marx, qu'il prend comme chef de cabinet et accepte comme conseiller.

A ce moment, des puissances obscures se lèvent. Il faut l'instinct du beau pour deviner qu'elles seront lumineuses et la décision dans le caractère pour les aider à le devenir. Marx sera, dès ces heures imprécises, parmi les premiers qui se dépenseront pour aider le public et forcer les pouvoirs à voir clair.

Dans un pauvre atelier du quartier Montparnasse un jeune peintre renonce au gagne-pain d'un métier et rejette les viatiques de l’école, pour obéir à son désir d'exprimer, en peignant sa nichée, toutes les inquiétudes et toutes les tendresses de l'humanité, et cela dans un langage qui ne conserve des êtres que l'essentiel. Carrière s'exerce.

Un autre artiste, dans un combat non moins rude, a déjà pu se voir refuser justice par ses confrères, et lui aussi a dit adieu aux travaux faciles et lucratifs pour se jeter à la poursuite d'un rêve grandiose. Rodin commence à modeler cette Porte de laquelle sont échappées à travers le monde tant d'images de volupté, d'effroi et de gloire.

La même époque voit encore Manet honni, Puvis de Chavannes tourné en dérision, Claude Monet vendant ses paysages deux ou trois cents francs avec peine, Fantin-Latour victime, au Salon, de places défavorables, — et l'État ignorant toutes ces ignorances avec sérénité.

Roger Marx prend résolument sa place parmi les rares critiques et amateurs qui comprennent et qui aiment. Il défend les méconnus et encourage les originalités naissantes dans ses articles du Voltaire ; il orne sa maison commençante des spécimens expressifs de ce qu’il admire. Et surtout, ce qui lui constitue un rôle à part, c'est que tout jeune fonctionnaire, luttant contre les plus hauts et les plus sourcilleux obstacles, il obtient, avec une étonnante énergie, pour les plus niés et les plus haïs de tous ces grands artistes, des commandes, des honneurs, et prend avec une jolie humeur souriante sa part des colères et des haines que ces assauts soulèvent, devant le public encore muet, dans le monde artistique tout entier.

Roger Marx ne porte pas son attention et son avidité de connaître, d’admirer et de défendre, sur les seules créations des peintres et des sculpteurs. En lettré amoureux de la belle écriture, il a été attiré l’u des premiers vers un des grands maîtres du raffinement, le précurseur en matière d'art français au XVIIIe siècle et d'art extrême-oriental, Edmond de Goncourt. Plus tard, il recueillera les Salons et les articles critiques des deux délicieux frères. — Une renaissance de la gravure originale, inaugurée naguère arec Bracquemond chez Cadart, commence à se manifester, des plus luxuriantes avec Buhot, Lepère, Gœneutte, Guérard, etc. Il va défendre également ces beaux artistes, recueillir pour les heures de rêverie, leurs feuillets si pleins d'invention et de couleur. — Compatriote et ami du génial Emile Gallé, de Nancy, il s'éprend non moins vivement du meuble unique, de l'objet d'art évocateur non à la façon d'un tableau sans doute, mais d'un morceau de musique (et l'évocation est-elle moins puissante pour notre sensibilité ?), et il recherche autour de lui, à Paris même, tous les beaux ouvriers isolés qui, à ce moment-là, 11 ayant de lieu d’exposition, parfois, que la boutique, et inconnus d’à peu près tous les amateurs, travaillent presque sans aucune chance de succès.

C’est ici que les facultés d'action, de persuasion et de réalisation de Marx se donnent carrière, et c'est à cette occasion même que se marque, d'une façon décisive, la première étape de sa route si nette et si logique. La Société Nationale des Beaux-Arts vient de se fonder à la suite d’une scission parmi les artistes, au lendemain de l'Exposition de 1889. D'un coup d'œil remarquablement pénétrant, Roger Marx a vu que l'heure et le lieu étaient choisis à merveille pour que les efforts et les créations des grands metteurs en œuvre de la matière fussent groupés enfin et pussent marcher de pair avec les tableaux et les statues. Grâce à son intervention, la Section des objets d'art au « Champ de Mars » est créée, et quels que soient les concours et les sympathies qui l'aient alors aidé, on doit dire que ce fut vraiment sa victoire personnelle ce jour-là.

Une nouvelle période allait alors commencer pour lui. Fortifié d'une autorité légitimement conquise, Roger Marx ne devait pas rencontrer moins de difficultés dans les taches qu'il s'était assignées, mais il allait préparer pour la seconde partie de sa vie une conclusion particulièrement éclatante. Inspecteur des Beaux- Arts, et mis à même par ses fonctions de connaître les richesses des musées provinciaux, il fut tout désigné, lorsque l'Exposition de 1900 fut décidée, pour organiser la Centennale de la Peinture. Ce que fut cette magnifique page d'histoire, écrite avec autant de discernement que de courage, on ne l'a pas oublié. Ce sont des événements qui comptent. Roger Marx sut trouver des œuvres capitales dans les musées et les collections particulières, remettre en honneur des artistes injustement dédaignés, affirmer désormais sans réplique ceux que l'on combattait encore, en un mot, préparer pour ainsi dire, à chaque pas, une surprise ou un acte de justice.

Cela n'avait pas été, bien entendu, son seul ouvrage pendant ces dix années nouvelles. Il continuait à se tenir avidement au courant, pour son plaisir et son besoin d'équité, de tous les jeunes talents qui naissaient. Il prenait la rédaction en chef de la Gazette des Beaux-Arts, à laquelle, tout en lui conservant sa magistrale tenue, il insufflait un esprit nouveau. Il demeurait en communion constante avec les écrivains de son choix, et quel choix ! c'est-à-dire Huysmans, Anatole France, André Gide, François de Curel, etc. A ses collections s'ajoutaient des œuvres de Lautrec, de Gauguin, de Maurice Denis, de Vuillard, de Bonnard, qui prenaient leur place à côté de celles de leurs grands anciens : Degas, Manet, Fantin, Carrière, Monet, Renoir, Lebourg, Lépine, Raffaëlli, Besnard, Chéret. Dans les séances des conseils supérieurs des beaux-arts, sa parole était écoutée, ses succès étaient autant de gagné pour les artistes vraiment indépendants et personnels.

Roger Marx comprenait ainsi la critique et les fonctions publiques comme une mission et comme un exemple. L'art était pour lui à la fois « une consolation, un embellissement de la vie, et son expression la plus haute ». Aussi rien d'humain ne lui était changer, et il s'intéressait non moins aux hommes qu'aux résultats de leur labeur. Il avait des vertus d'attraction, de sympathie, et les exerçait envers les artistes d'une façon simple, affectueuse et cordiale, qui lui donnait, lorsqu'il le voulait, beaucoup de charme. Je dis : « lorsqu'il le voulait », car son urbanité choisissait, et son affection ne se prodiguait point ; mais lorsqu'on s'était impose à son estime ou à son admiration, l'on avait en lui un défenseur fidèle. Il a vécu beaucoup par les yeux et par le cœur. On peut dire que cela a contribué à la fois à orner et à intensifier sa vie, car toujours ses émotions furent vives, et il ne ressentait point à demi. Rien sans art était jadis sa devise, mais on peut ajouter qu’il n'y a point de grand amour de l'art sans une profonde sensibilité, perpétuellement à vif.

Tels sont les principaux traits de cette physionomie et de ce caractère. Je crois en avoir dit le principal, tout en espérant qu'une étude filiale ou amicale les reprendra et les développera plus à loisir. Je revois encore le Roger Marx des jeunes années, avec longue barbe blonde, ses yeux bleus, où le sourire se mélangeait à la rêverie, ou alternait avec lui, sourire d'une curieuse complexité de bienveillance et d'ironie. Carrière, Rodin, Bernard, Priant, le Dr Paulin et divers autres ont laissé de lui de vivantes effigies complètes ou partielles. Mais je crois qu'il faudrait réunir tous ces pots traits pour en obtenir un auquel rien ne manquât. Le portrait on le trouverait également dans les propres écrits de notre ami ou son besoin de la tournure élégante, du mot délicat et coloré enchâssant une idée juste ou une pénétrante vue d'avenir, se constate à son plus haut point dans son dernier livre, en quelque sorte son testament artistique, l'Art social.

Les artistes sentaient cet ascendant et y rendaient hommage. Dans les réceptions qui avaient lieu à son foyer, ils venaient lui demander un conseil, lui soumettre un projet, lui exprimer leur reconnaissance d'un appui donné généreusement. Beaucoup d'idées furent ainsi échangées, qui ne seront point perdues, car les idées sont incorruptibles et indestructibles comme un or volatil qui passe et repasse dans l’atmosphère où l'on pense.
Il en est de même des œuvres d'art, qui rassemblées avec un fervent amour, paraissent s'éloigner de la maison quelles décoraient, mais qui, en réalité, reviennent à la réputation et comme au portrait même de celui qui les avait comprises.

Aussi les amis de Roger Marx ne peuvent-ils regretter que la collection formée par lui se disperse aujourd'hui ; chacun des éléments qui la composaient va porter en cent lieux lointains le prestige de l'art français et attester le goût de celui qui, pendant les années qui lui furent accordées, l'avait si bien servi.

Ce qu'est cette collection, le présent catalogue le dit avec une précision trop grande pour que nos commentaires ne risquent de faire double emploi avec leur éloquent défilé.

Tous les noms glorieux que nous avons cités au cours de cette notice sont représentés par des pages typiques, par les notes et les œuvres; œuvres parfaites, complètes, comme le pastel de la Toilette par Degas, la Leçon d'écriture de Carrière, la Femme à l'éventail de Fantin-Latour, le magnifique bronze du Baiser de Rodin, qui atteint une si grande beauté de modelé et de patine, qu'il semble une chose léguée par un siècle déjà bien loin du nôtre; — « notes » aussi expressives que les œuvres, et qui représentent si bien, en même temps, le moment heureux de l'artiste et la prédilection de l'acquéreur, qu'elles semblent avoir été prédestinées à former un trait d'union entre eux.

Je ne puis procéder par énumération, même de noms, avant surtout voulu ici, non pas faire tâche d'expert ni dicter au public ses appréciations, mais donner l’idée générale d'un caractère, ce qui est la meilleure façon d'expliquer une collection aussi harmonieuse et aussi tranchée.

Toutefois, comment ne pas signaler les principaux Lautrec, si incisifs, devenus (dût ce mot paraître excessif) pour ainsi dire classiques ; le très beau Gauguin, les Raffaëlli, les Lepère, les Chéret, le superbe ensemble de Lebourg, les charmantes petites peintures de Maurice Denis, de Vuillard, de Bonnard, de Roussel ?

Et quand j’aurais cité cela encore, j'aurais omis bien des choses capitales. Comme la grande figure orientale de Manet, d'une blancheur si somptueuse, la Femme en rose de Renoir, les deux Monticelli, tirés du meilleur de l'écrin ; — enfin l'admirable série des dessins, à elle seule collection exceptionnelle, en tête de laquelle s'avancent le majestueux carton de Puvis de Chavannes, la réplique de l’Étude, de Fantin-Latour, les Danseuses, de Degas, et fulgurent les noms de Millet, de Daumier, d'Ingres, de Gustave Moreau, de Forain, de Cazin, de Willette, de Besnard, d’Odilon Redon. Le goût des beaux dessins, c'est la pierre de touche du collectionneur : rappelez-vous les His de la Salle, les Goncourt.

J’ai conscience, malgré la concision que m'imposent les limites d’une simple préface, de n'avoir point omis trop de détails nécessaires. Ainsi avais-je, heureusement, parlé de Galle et de l'amitié qu’il ressentait pour Marx. Cette amitié s'éclaire aux mystérieuses et féeriques lueurs de quelques-unes des plus belles pièces du maître. Quelles joies de l'œil et de l'esprit ressentit et lègue celui qui posséda ces merveilles ! De même, le nom de Rodin ayant été inscrite ici dès les premières lignes, j'éprouve du plaisir à finir ma trop rapide revue en rappelant que ce fut Marx qui sortit de l’omble où on les tenait à Sèvres les pièces de céramique que dans sa jeunesse le maître avait fait palpiter d'un admirable poème païen, cette trouvaille, qui a donné matière à un écrit important, constitue encore une collection à part, belle et rare entre toutes.

On a souvent dit bien du mal de la critique. Le résumé d'une telle vie et le tableau d'une telle collection est la meilleure réponse qu’on puisse faire à ces discours.

Roger Marx a été, dans toute l’acception du mot au temps passé, un honnête homme ; les manifestations du beau, du bien et du juste lui tenaient au cœur. Sa collection, le souvenir de ses amis, sa carrière, ses écrits, tout cela lui en porte le plus éloquent et le plus durable témoignage.

Arsène ALEXANDRE."

"Conditions de la Vente", n. p.
"Ordre des Vacations", n. p.
Introduction Anatole France, n. p.
Preface, p. 5-10
"Tableaux", cat. no. 1-92, p. 11-51
"Pastels, Aquarelles, Dessins", cat. no. 93-232, p. 53-110
"Sculptures", cat. no. 233-254, p. 111-121

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- "Conditions De La Vente : Elle sera faite au comptant. Les adjudicataires paieront dix pour cent en sus des enchères. L’exposition mettant le public à même de se rendre compte de la nature et de l'état des objets, aucune réclamation ne sera admise une fois l'adjudication prononcée."
-Work discriptions are provided in catalogue