Exposition de Peintures de André Lhote

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Nr. of pages: 10.
Holding Institution: Bibliothèque des Arts Décoratifs

Morice, Charles: André Lhote, 2p.

"En ce très jeune artiste, nous apparaît une personnification étrangement expressive des tendances actuelles de l'art, avec tout ce qu'elles comportent de certitudes et d'inquiétudes.

On ne lui reprochera pas d'être sensible à des influences très diverses. Cette sensibilité proclame le talent - car c'est toujours par des Maîtres qu'elle se laisse émouvoir - et, dans cet aveu même des impressions reçues, la sincérité. De toutes ces influences, du reste, il en est deux qui priment toutes les autres et confèrent à celles-ci le caractère d'accidents plus ou moins heureux, plus ou moins durables: l'effort d'André Lhote s'inscrit entre la pensée de Carrière et celle de Gauguin.

Du Maître qui définissait son art: « Une arabesque reliant les seuls volumes significatifs », à celui de qui j'ai pu formuler, avec son approbation, la doctrine par ces mots ; « La nature est matière, l'esprit est matrice », le chemin n'est pas aussi long que certains l'ont pu croire. Si, ce chemin faisant, Lhote s'est arrêté devant Rubens, par exemple, ou devant Cézanne, il ne s'est guère, dans ces stations, écarté de Carrière, qui sentit son génie s'éveiller devant l'œuvre de Rubens, ou de Gauguin, qui avait voué à Cézanne une admiration profonde.

Je le crois: l'artiste qui pourrait joindre l'intensité expressive de Carrière à la splendeur décorative de Gauguin serait le grand artiste, celui que tous nos vœux appellent. Il ne s'agit point, du reste, d'une petite combinaison éclectique et raisonnée, à laquelle répugneraient, fatalement et heureusement, l'indépendance et le talent. C'est, au contraire, des fatalités heureuses d'un tempérament doublement doué qu'on peut attendre cette double el sûre merveille; si j'en parle ici, c'est que j'entrevois chez André Lhote les signes du double don. Peut-être, à cette heure, est-il plus vivement entraîné dans la voie de Gauguin que dans celle de Carrière. L'influence de celui-ci, ou la parenté du jeune peintre avec lui, est surtout sensible dans les œuvres les plus anciennes – Autour de la Chanteuse, Jardin d'Amour. Puis, le charme de la couleur pure semble triompher de cette poésie de la plus rigourense logique, et André Lhote s'absorbe en de longues études devant certaines des plus splendides compositions de Gauguin. Il en a fait des copies fidèles, et, dans des œuvres personnelles, il s'en est librement inspiré.

L'exemple admirable de Pierre Girieud, lui aussi fidèle librement, et supérieurement, au Maître de Tahiti, a encouragé André Lhote dans ces études. Maintenant, nous le voyons réagir contre les dangers d'une formule: il regarde directement la vie dans son agitation variée, et c'est de la réalité objectivement considérée qu'il cherche l'expression décorative: ces Nus devant le Fleuve, ces Grévistes, ces séries de Têtes d'Enfants aux violentes enluminures.

Il apporte, dans cette observation directe de la vie, une passion dont le foyer reste intérieur, et c'est cette ardeur intime qui permet de tout espérer. Il est en plein développement: il tient toutes les promesses que j'ai faites en son nom le jour où, le premier, - il est doux de m'en souvenir, - je signalai au public ce nom, qui sera celui d'un grand artiste.

Charles MORICE."

"Dessins - Aquarelles", specified but not listed after cat. no. 57.

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